
Retour sur BRIDGES à l’UNOC3
En juin 2025 s’est tenue la 3e conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNOC3) à Nice, avec pour thème principal « Accélérer l’action et mobiliser tous les acteurs pour conserver et utiliser durablement l’océan ».
Le sommet politique a été précédé de plusieurs événements spéciaux, dont le One Ocean Science Congress qui s’est tenu du 3 au 6 juin. Ce congrès scientifique a réuni de nombreux scientifiques du monde entier, qui ont formulé 10 principales recommandations à destination des décideurs politiques qui se sont réunis à l’UNOC. Elles sont issues de plus d’un an de travaux menés par un comité scientifique international, et ont été officiellement remises aux chefs d’État et de gouvernement le 8 juin.
- Encourager la responsabilité de tous les pays à l’égard de l’Océan
- Promouvoir des solutions climatiques océaniques sûres et équitables
- Protéger et restaurer les écosystèmes marins et côtiers
- Interrompre les usages nuisibles des fonds marins et approfondir la connaissance des abysses
- Partager équitablement les bénéfices des ressources génétiques marines
- Mettre fin à la pêche illégale, non déclarée et non réglementée, et améliorer la transparence des accords de pêche
- Construire des systèmes alimentaires océaniques durables, équitables et sûrs
- Éliminer la pollution plastique marine
- Réduire les émissions de CO2 et les impacts du transport maritime
- Investir dans les connaissances transdisciplinaires pour agir en faveur des océans
A l’issue de l’OOSC, les scientifiques ont signé un manifeste appelant à l’action des décideurs : « Nous exigeons des mesures immédiates, fondées sur des preuves, basées sur l’équité et ancrées dans notre responsabilité commune de protéger l’océan pour les générations actuelles et futures. »
Dans ce manifeste, on retrouve des demandes très en lien avec BRIDGES :
- Protéger intégralement et de manière permanente au moins 30 % des océans.
- Augmenter considérablement les investissements dans la science, l’observation et la modélisation des océans.
- Aligner le financement et la gouvernance sur le besoin urgent de régénérer les écosystèmes et de partager équitablement les bénéfices tirés des océans.
- Défendre les droits et les systèmes de connaissances des peuples autochtones et des communautés côtières.

Entre présentations, discussions, espaces ouverts au grand public, de nombreux chercheurs de BRIDGES ont participé à l’UNOC3.
Brice Trouillet, co-porteur de BRIDGES CO-CONSTRUCTION a organisé un Town hall sur la gouvernance océanique et maritime, dont le message suivant a émergé :
«La gouvernance des océans consiste essentiellement à gérer le comportement humain et son influence sur la mer. Dans un contexte de crises multiples, la gouvernance des océans doit: 1) être inclusive, 2) construire un nouveau narratif qui évite la polarisation entre conservation et croissance économique, 3) intégrer des initiatives à différentes échelles et divers systèmes de connaissances, 4) être pragmatique et adaptative, et 5) promouvoir la connaissance des océans. En intégrant ces éléments, la gouvernance des océans devient un moteur de justice et d’équité sociale.».
Ignacio Palomo, chercheur dans BRIDGES AVATAR a participé au Pavillion Cryosphère, qui a contribué à établir des liens avec des pairs travaillant sur les impacts du changement climatique dans les zones de haute montagne et les communautés montagnardes associées ».
Le baromètre Starfish a été lancé le 8 juin. Il propose une synthèse claire et accessible de l’état de santé de l’océan, des pressions humaines et de leurs impacts sociétaux. L’article STARFISH 2025 a été publié dans State of the Planet, qui sera intégré dans le numéro 9 de l’Ocean State Report dont Pierre Brasseur, co-porteur BRIDGES AVATAR est co-éditeur. Plusieurs BRIDGERs dont Joachim Claudet et Patrice Guillotreau y ont contribué.
Pierre Brasseur était également présent aux 30 ans de Mercator sur Ruhl Plage, avec la présence notamment de Valérie Verdier, PDG de l’IRD, Jean-François Doussin pour le CNRS et Patrick Vincent ancien DG de l’Ifremer. Pascal Lamy, ancien commissaire européen et directeur actuel du programme STARFISH 2030 était également présent. Pierre a pu échanger informellement sur les synergies possibles entre DTO (Digital Twin Ocean porté par Mercator) et le futur avatar BRIDGES.





Les présentations et interventions des chercheurs de BRIDGES à l’OOSC










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Extrait:
« Équité sociale, coalitions et société civile : les voix montantes
Pas de durabilité sans équité. Le principe, martelé par Joachim Claudet lors d’un side event organisé par le CNRS, peine encore à s’imposer dans les négociations internationales. « L’économie bleue reste profondément inégalitaire », souligne-t-il. En témoigne la question des brevets sur les ressources génétiques marines : 48 % d’entre eux sont détenus par une seule entreprise, le géant de la chimie BASF.
Face à cette concentration, plusieurs initiatives appellent à une gouvernance plus inclusive. L’idée : impliquer ONG, communautés locales et société civile dans les processus décisionnels. Une dynamique encore émergente, mais cruciale pour que la durabilité ne soit pas qu’un mot d’ordre, mais le fruit d’une démarche collective et inclusive. »
Quelques engagements phares de l’UNOC3
La 3e conférence des Nations Unies sur l’Océan a abouti à la formulations d’engagements.
Parmi eux, nous pouvons en retenir quelques-uns :
- Grâce à l’élan de la Conférence et à une diplomatie bleue active, 50 États ont déjà déposé leurs instruments de ratification de l’accord « BBNJ » (Biodiversity Beyond National Jurisdiction) ; 6 États supplémentaires, ayant achevé leur processus national de ratification, et 12 États supplémentaires, s’apprêtant à le faire, se sont engagés à déposer leurs instruments de ratification au plus tard lors de la semaine de haut niveau de l’Assemblée générale des Nations Unies de septembre 2025. L’ensemble de ces engagements assure ainsi l’entrée en vigueur tant attendue de ce traité, qui régule 64% de l’Océan et donc 50% de la surface du globe, au plus tard en janvier 2026. Il assure aussi la tenue, cette même année, de la COP1 de l’Océan. Les négociations du BBNJ ont quatre objectifs :
- Mieux connaitre l’impact de nos activités sur l’environnement
- Mieux protéger les zones sensibles (par la création d’aires marines protégées)
- Partager de manière équitable les bénéfices des ressources génétiques
- Développer la formation et les compétences
- La création de l’organisation intergouvernementale Mercator International Center for the Ocean, soutenue par 12 États européens, a été actée lors de l’UNOC3 avec les premières signatures de son traité international par la Norvège et la France. Issue de la transformation de Mercator Ocean International, cette organisation permettra de concevoir, développer et exploiter des systèmes numériques océaniques de classe mondiale englobant la physique marine, la biogéochimie et la dynamique des écosystèmes. Elle fournira les services d’information numérique fiables, répondant aux besoins de ses États membres. Elle soutiendra ces derniers dans leurs engagements dans la gouvernance internationale de l’Océan, en remplissant des missions de Recherche et Développement, de fourniture de Systèmes Numériques Avancés et de codéveloppement d’un Jumeau Numérique Global, l’Océan Digital.
- La Mission Neptune, a été annoncée à l’UNOC3. La mission réunira les expertises océanographiques et les meilleures technologies, y compris spatiales, afin d’investir dans une connaissance utile et accessible librement à toutes les parties. Elle permettra de révéler les opportunités offertes par l’Océan ainsi que les pressions et menaces qui pèsent sur les écosystèmes marins. Elle fournira aussi la nouvelle base de connaissance essentielle sur laquelle s’appuiera la mise en oeuvre de l’Accord BBNJ.
- La communauté des chercheurs s’est engagée à publier chaque année le Baromètre Starfish, un rapport scientifique accessible à tous, sur l’état de l’Océan, les pressions exercées par l’activité humaine et leurs impacts sociétaux. Élaboré par des experts nationaux et internationaux, ce baromètre revu par les pairs contribuera à éclairer les politiques publiques marines et à sensibiliser la société civile, en soutien direct aux ODD. Starfish, représentant les cinq bras d’une étoile de mer, sera une référence pour rendre compte, avec transparence et rigueur, des avancées réalisées, assurant ainsi que la dynamique initiée par l’UNOC se traduise en résultats tangibles, mesurables et solidement étayés par la science.
- En se fondant sur les priorités identifiées par les États eux-mêmes, la Plateforme Internationale pour la Durabilité de l’Océan (IPOS) fournira aux gouvernements des options d’actions politiques sur mesure, co-construites, fondées sur la science et actionnables localement, afin de les aider à respecter leurs engagements internationaux en faveur de l’Océan.
- 140 universités marines du monde entier se sont réunies pour la première fois à l’UNOC afin d’initier l’International Marine Universities Network. La comparaison des approches pédagogiques internationales, le développement des opportunités de formation pour les étudiants et les professionnels, la consolidation du dialogue entre le monde académique, la société civile et les décideurs politiques sont les priorités en ligne avec la nécessité d’établir et de renforcer les interactions étroites entre les scientifiques et les décideurs et de promouvoir des politiques fondées sur la science, favorisant la durabilité à long terme de l’Océan, engageant le public, encourageant l’inclusivité et stimulant l’innovation par la recherche interdisciplinaire.
- L’objectif de Kunming-Montréal de protection de 30% des terres et des mers d’ici 2030 doit guider l’ambition pour l’Océan. A la veille de l’UNOC, 8,4% de l’Océan était protégé, selon Protected Planet. Grâce à la mobilisation des 14 États qui se sont engagés à étendre leurs réseaux d’aires marines protégées, ce sont plus de 10% qui sont désormais protégés. Le mouvement accéléré à Nice s’intensifie grâce aux prises de conscience et projets annoncés par de nombreux États marins. Plusieurs pays se sont engagés à anticiper la mise en oeuvre du traité BBNJ, en identifiant de potentielles aires marines protégées en haute mer. Un groupe des champions des aires marines protégées a été lancé avec la France, le Panama, le Chili, l’Australie, le Sénégal, la Grèce, les Seychelles, le Portugal et le Costa Rica, pour encourager la désignation de nouvelles aires. La première aire marine protégée transnationale en haute mer a notamment été annoncée par le Costa Rica, conjointement avec l’Equateur et la Colombie.
- A l’horizon 2026, la France s’est engagée à couvrir 78% de sa zone économique exclusive par des aires marines protégées, dont 14,8% en protection forte.
- A l’occasion de Nice, 19 Etats ont annoncé la mise en place de plans nationaux visant à protéger et restaurer les écosystèmes océaniques tels que les mangroves, ainsi qu’à gérer les déchets côtiers notamment plastiques.
- Alors que le quatrième événement mondial de blanchiment des coraux le plus répandu jamais enregistré pousse les récifs du monde vers un point de basculement écologique, une coalition de partenaires gouvernementaux et philanthropiques a annoncé plus de $25 millions de dollars de nouvelles contributions au fonds mondial pour les récifs corallines (GCFR).
- S’agissant des méthodes de pêche destructrices, des Etats ont pris des engagements forts, tels que la Suède interdisant désormais le chalutage de fond dans toutes ses zones marines protégées, ou la France annonçant interdire le chalut de fond, mais aussi toute activité minière, dans les zones cartographiées sur une base scientifique, concertée avec les pêcheurs.
- Afin de permettre une meilleure inclusion de l’Océan dans les politiques extérieures de l’Union européenne, ainsi qu’une meilleure synergie entre les politiques de l’Union européenne (UE), le premier Pacte européen pour l’Océan a été présenté le 9 juin 2025 par la Présidente de la Commission européenne, aux côtés du Président du Conseil européen, et de plusieurs chefs d’État et de gouvernement des États membres. Lors de l’UNOC3, l’UE s’est engagée à hauteur d’environ 1 milliard d’euros dans pour l’Océan, qui seront investis dans le priorités du Pacte :
- Restaurer la santé de l’Océan et sa productivité à travers une gouvernance intégrée et des pratiques régénératives
- Accélérer le développement d’une compétitivité durable de l’économie bleueSoutenir le développement des communautés côtières et insulairesRenforcer la sécurité maritime et la résilienceSoutenir la recherche océanique et l’innovation, notamment au travers du développement du Jumeau numérique de l’Océan, ainsi que d’une grande mission d’observation et d’exploration
- Renforcer la diplomatie océanique de l’UE et une gouvernance internationale basée sur le droit.
- Les Conventions des mers régionales, sous l’égide du PNUE, ont renforcé leur dialogue avec les organisations régionales de gestion de la pêche, en vue de renforcer les synergies nécessaires entre les enjeux environnementaux et ceux de la pêche.
- Co-organisé avec le Président de la République de Palaos et la Première ministre de la Barbade, le Forum mondial des îles a réuni, des 8 au 10 juin 2025, 30 États et territoires insulaires de tous les continents. Les Chefs d’État et de gouvernement présents ont à cette occasion pu promouvoir les solutions concrètes développées par et pour les États insulaires pour développer une économie bleue durable, protéger leurs écosystèmes marins et lutter contre la pollution plastique :
- Dans le cadre du Pacte pour la Prospérité des Peuples et de la Planète (4P), le Forum mondial des îles a appelé à la meilleure prise en compte de la vulnérabilité multidimensionnelle au travers d’une coalition de bailleurs internationaux pour renforcer l’équité, l’efficacité et la transparence dans l’allocation des financements internationaux.
- Le Forum a également abordé les enjeux de décarbonation du transport maritime, aspect majeur à la fois pour la connectivité des îles et leur approvisionnement, et pour l’atteinte des objectifs climatiques internationaux ; la pollution des côtes et des cours d’eau, notamment plastique, et l’importance de réaffirmer la nécessité d’aboutir à un traité mondial ambitieux pour mettre fin à la pollution plastique ; ainsi que la préservation et valorisation des écosystèmes marins afin de mobiliser pour l’atteinte de l’objectif de protéger 30% des terres et 30% de l’Océan d’ici 2030.
- La France a également annoncé que Mayotte pourra engager formellement les démarches pour obtenir le classement de sa double barrière de corail au patrimoine mondial naturel de l’UNESCO. Le lagon de Mayotte, d’une superficie de 1 500 km2, est le second plus grand au monde. Sa double barrière de corail abrite une biodiversité d’une richesse exceptionnelle : 250 espèces de coraux recensés, plus de 600 espèces de poissons.
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